Energie grise pour fabriquer les éoliennes, surcout et inadéquation des rythmes de production, cessons les dogmes durables ?
Eolien. Une étude contestée estime le surcoût à un milliard d’euros par an d’ici 2020.
Enervement dans le monde effervescent de l’éolien. Une énième étude vient à nouveau de secouer les pales des aérogénérateurs français. A l’origine, Vincent Le Biez, élève ingénieur du corps des Mines, qui publie à l’Institut Montaigne (think tank patronal reconnu) une étude plutôt critique sur l’efficacité économique et écologique de l’éolien, battant en brèche les arguments des plus hautes autorités de régulation de l’énergie.
D’après lui, le développement de l’éolien en France «ne répond pas à un besoin, étant donné la sobriété du parc de production électrique français en termes de CO2 [grâce au nucléaire, ndlr]». Il écorne passablement l’objectif affiché lors du Grenelle de l’environnement, qui fixe à 25 000 mégawatts (MW) la puissance éolienne installée d’ici à 2020. «Si cet objectif devait se réaliser, il se traduirait par un surcoût de 1 milliard d’euros par an d’ici à 2020 et de 2,5 milliards d’euros au-delà.» C’est-à-dire 100 euros par an et par foyer.
Ennemis.
Face aux inquiétudes liées au pouvoir d’achat, l’argument fait mouche. Mais il en faut plus pour décoiffer André Antolini, truculent président du Syndicat des énergies renouvelables, qui voit dans cette étude une vulgaire commande des ennemis du Grenelle. «Le Grenelle a retenu des objectifs ambitieux en matière de renouvelables, ce qui déçoit certains. Si on suit les prévisions de ce jeune élève-ingénieur, on dit adieu au Grenelle. Et on ne remplit pas les objectifs de la directive européenne, qui fixe à 20 % notre part de renouvelables d’ici à 2020.»
Mais l’étude l’interroge… En effet, le chiffre de 100 euros est sans commune mesure avec celui calculé par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) qui, elle, estime le surcoût actuel de l’éolien à 90 centimes d’euros par foyer et par an. Il faut dire que les deux résultats ne racontent pas la même chose : l’étude de l’institut calcule le coût supporté par la collectivité pour mettre en place une politique, tandis que la CRE a mesuré le coût de l’éolien sur la facture d’électricité. «Ce chiffre était valable en 2006, quand il y avait un parc éolien d’1 GW [1 000 MW]. Mais même en extrapolant, on reste assez loin des valeurs de l’Institut Montaigne», indique un porte-parole de la CRE. «Nous déterminons le montant des compensations versées à EDF pour avoir acheté plus cher de l’électricité renouvelable. Lui cherche à savoir ce que représente le coût global pour la collectivité du changement de mix énergétique français.»
Ce n’est pas logique, mais c’est ainsi : produire de l’énergie à base de vent coûte plus cher. Histoire de lancer la filière, l’électricité produite grâce au vent est achetée par EDF à un tarif supérieur, en l’occurrence 82 euros le mégawattheure contre 65 euros pour l’électricité du marché. EDF paie donc 17 euros de plus par mégawattheure éolien. Ce surcoût est en réalité supporté par tous les Français, qui s’acquittent d’une taxe, la contribution au service public de l’électricité (CSPE), proportionnelle à leur consommation. «Il faut voir cette taxe comme un investissement permettant d’accompagner la montée en puissance progressive de la filière», rassure Antolini.
«Energie fatale.»
Argument supplémentaire de l’étude critique, le manque de flexibilité des aérogénérateurs. «En matière d’énergie, il faut produire autant qu’on consomme», explique Vincent Le Biez. «Or, l’éolien est une énergie fatale : on est obligé de l’injecter dans le réseau quand elle arrive et elle n’est pas prévisible.» La variabilité de l’énergie éolienne est une réalité physique, mais les progrès de la modélisation et de la prévision météorologique permettent de mieux l’anticiper. D’autant qu’on sait mieux prévoir les pics de consommation d’électricité. La France reste le deuxième gisement éolien en Europe, derrière la Grande-Bretagne. «Le vent souffle toujours quelque part», rappelle l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), qui a dressé quelques atlas éoliens départementaux.
Diversification.
Par ailleurs, chaque kilowattheure éolien évite l’émission de 300 grammes de CO2. La CRE prévoit une production éolienne de 5,5 TWh (5 500 GWh) pour 2008, soit 1,65 million de tonnes de CO2 évitées (sur un total d’émissions françaises d’environ 500 millions). «Je n’ai aucun problème avec l’éolien, prévient Vincent Le Biez. On peut dire qu’il participe à la diversification du bouquet énergétique français. Mais on n’a pas besoin que 10 % de la consommation d’électricité soit couverte par de l’éolien. Comme on subventionne cette énergie, cela pourrait coûter trop cher.» Au fond, le débat dépasse la question du surcoût et de la facture EDF des particuliers. Quel prix accepte-t-on de payer pour doter son pays d’énergies propres ?
Bon, certains contestent et méritent un droit de réponse ?
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