dimanche 22 juin 2008

Algérie : accord sur le nucléaire civil

Ecologie ou géopolitique ?
Si la réduction de la consommation des énergies fossiles est une priorité,
la mise sous dépendance européenne des industries énergétiques arabes n'en est pas moins
une séduisante perspective...



Par Ali Boukhlef


"La forte délégation de la presse française, tous secteurs et tendances confondus, qui ont atterri hier en matinée à l’aéroport international d’Alger, annonce une visite particulière. Et celle qu’effectue le Premier ministre français, François Fillon, depuis hier l’est pour plusieurs raisons.C’est, en effet, la première fois depuis 22 ans qu’un chef du gouvernement français vient à Alger, même si les présidents se sont succédé, notamment depuis l’ère Chirac, sans interruption.Mais la visite de François Fillon a ceci de particulier : elle vient à un moment où la polémique enfle sur des sujets de brûlante actualité, comme la question de la mémoire et celle, plus évidente, de l’union pour la Méditerranée, dont le premier sommet se déroulera dans trois semaines dans la capitale française. L’autre aspect, très attendu de cette visite que Fillon lui-même a qualifiée d’«historique», est le volet économique. Parce que cela fait longtemps que la France est le premier fournisseur de l’Algérie. Mais seulement dans le domaine commercial, puisque sur le plan des investissements, notamment directs, elle s’est fait damer le pion par d’autres puissances, dont la Chine. C’est pour répondre au souci, toujours permanent, de l’Algérie qui rappelle à son ancien colonisateur qu’elle peut diversifier ses partenaires et que Paris est aujourd’hui contournable, que François Fillon s’est fait accompagner par une vingtaine de chefs d’entreprise. Et pas des moindres. A commencer par Lafarge, Areva et d’autres.


C’est aussi pour cela que le Premier ministre français a axé l’essentiel de son discours, improvisé en réaction aux déclarations de son homologue algérien, sur le volet économique, évitant par là même de se prononcer sur certains problèmes politiques, notamment celui du Sahara occidental.


A Belkhadem qui s’inquiète de la représentation des musulmans d’origine algérienne en France au sein des instances religieuses françaises –l’allusion aux dernières élections du CFCM est claire- M. Fillon a rappelé la place laissée à Dalil Boubakeur, recteur de la puissante Grande Mosquée de Paris, qui perd de son influence au fil des années. A interpellation concernant la libre circulation des personnes, le chef du gouvernement français a rappelé, à coups de chiffres, que les autorités consulaires concèdent de plus en plus de visas aux Algériens.Et pour ne pas rater son voyage, malgré les difficultés qui subsistent d’une «relation complexe» entre les deux pays, l’invité de l’Algérie sort de son calepin une feuille de route : un accord sur l’énergie nucléaire à «usage pacifique» a été signé entre Christine Lagarde, la ministre française de l’Economie, et Chakib Khelil, ministre algérien de l’Energie. Une convention de partenariat dans le secteur de la défense a également été paraphée entre Hervé Morin et Abdelmalek Guenaïzia. Et si les termes du contrat ne sont pas dévoilés, il semblerait, à en croire les euphémismes employés par François Fillon, que la France va vendre des armes à l’Algérie. Le Premier ministre de Sarkozy a seulement dit que les deux pays auront «une coopération dans le domaine de l’industrie militaire». Ces deux derniers domaines sont exhibés, par Fillon, comme un gage de confiance et, surtout, une preuve du caractère «exceptionnel» des relations entre les deux pays. Le troisième contrat signé porte, quant à lui, sur le volet financier. Une école dans ce domaine va être créée, en plus de l’Institut supérieur des affaires que Fillon a visité hier en fin d’après-midi, juste avant d’intervenir devant la communauté française établie en Algérie, chez qui il est invité à dîner.En plus du concret, François Fillon a voulu tracer une feuille de route pour l’avenir. Il a dit souhaiter, par exemple, que l’accord de 1968 sur la circulation des personnes soit «réactualisé» de sorte à l’adapter «aux lois de la République française». Il en veut de même pour l’accord signé entre les caisses d’assurance sociale des deux parties, qui a plus de vingt ans d’âge.


Concernant l’union pour la Méditerranée, François Fillon, qui ne s’est pas trop étalé sur le sujet que Belkhadem n’a même pas abordé, a expliqué que ce sera «un cadre de dialogue et de concertation».


Par contre, le chef du gouvernement français n’a pas voulu apporter du nouveau dans la question de la mémoire. Il s’est contenté de rappeler que Nicolas Sarkozy et Bernard Bajolet, l’ambassadeur de France à Alger ont fait des déclarations dans le sens de la reconnaissance des méfaits du passé colonial. Il a aussi rappelé qu’il a mis en place une fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie au même titre que la promulgation d’une loi sur l’accès aux archives. Durant la deuxième journée de sa visite, François Fillon déposera ce matin, au monument des martyrs, une gerbe de fleurs à la mémoire des chouhada. Il aura des entretiens, suivis d’un déjeuner, avec le président de la République avant de rencontrer, en milieu d’après-midi, les journalistes à l’aéroport d’Alger. Autant dire qu’une autre journée chargée attend François Fillon, dont la visite est à ajouter au registre des relations «exceptionnelles» entre la France et l’Algérie.
A. B.
Le carnet de commandes des entreprises françaises s’enrichit
Dans l’agenda de François Fillon, il n’y a pas que du politique et du militaire. Le Premier ministre français a annoncé, au cours de l’ouverture de la rencontre avec son homologue algérien, que plusieurs contrats dans le domaine économique sont signés ou sont sur le point de l’être. Ainsi, on a appris que Lafarge a acquis Les Ciments de la Mitidja, «ce qui va permettre de nouveaux investissements et de nouveaux emplois». Saint Gobin va aussi investir dans le domaine de la transformation du verre et de l’emballage de manière générale tandis que Schneider Electric s’associera avec l’algérien AMC dans la fabrication des outils électriques.D’autres contrats comme la fabrication des levures, par exemple, sont en discussions. Air Liquide et Total sont en en train de conclure avec des partenaires algériens. On parle aussi d’un contrat entre GMAX et des Algériens dans le domaine du montage de véhicules industriels.Ces accords se veulent, selon M. Fillon, une manière de démentir l’idée selon laquelle les boîtes françaises sont frileuses lorsqu’il s’agit d’investir en Algérie.
A. B.



Aussi résumé par Romandie.

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