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"La France risque de manquer de personnel qualifié pour ses centrales nucléaires et doit prendre d'urgence des mesures pour éviter cette situation.
Le vieillissement de la main d'oeuvre, une offre de formation qui se raréfie et le peu d'enthousiasme des étudiants pour un secteur souvent jugé secret et dangereux menacent les ambitions de la France en matière d'énergie nucléaire où elle est numéro deux mondial derrière les Etats-Unis.
"La question de la main d'oeuvre vieillissante donne des insomnies à de nombreux P-DG", dit le consultant Capgemini dans une étude sur la renaissance de l'énergie nucléaire.
Avec le départ à la retraite de la génération du baby-boom, "il est probable que l'impact sera plus prononcé dans le secteur nucléaire en raison de la spécificité de la formation, de l'expérience et des critères d'acquisition des licences", souligne Capgemini.
Le nombre d'écoles qui forment les ingénieurs et les techniciens du nucléaire a été divisé par deux depuis 25 ans, relève encore le rapport.
La France, qui possède 58 réacteurs nucléaires, compte sur son savoir-faire pour gagner des contrats si, comme elle l'espère, de nombreux pays choisissent le nucléaire pour leur sécurité énergétique et combattre le réchauffement climatique.
EDF doit embaucher 10.000 personnes sur les 10 prochaines années dont la moitié spécialisées dans le nucléaire, estime Laurent Turpin, directeur de l'Institut National des Sciences et Techniques Nucléaires (INSTN).
"Ceci signifie 500 nouveaux ingénieurs par an dont 20% dans des projets internationaux", note Laurent Turpin. Or, seuls 350 ingénieurs spécialisés dans le nucléaire sortent actuellement des écoles chaque année. Et pour enrayer le déclin, la formation devrait concerner dans les trois prochaines années environ 1.000 ingénieurs par an.
Mais il est difficile de convaincre les candidats, notamment depuis la catastrophe de Tchernobyl en 1986.
"Il y a à travailler en amont au niveau des universitaires et de l'opinion des élèves", note Colette Lewiner de Capgemini.
"On a besoin de faire des présentations dans les forums, être sur les campus et discuter avec les étudiants. Il n'y a pas de sensibilisation suffisante aux problèmes énergétiques et au besoin de production", estime-t-elle encore.
La réticence des entreprises à augmenter les salaires est une autre raison qui dissuade les ingénieurs.
"L'objectif n'est pas de faire une surenchère à la rémunération, ce n'est pas dans l'intérêt des entreprises, mais compte tenu que les marchés se redynamisent un peu, il est normal que les salaires aillent en s'améliorant", explique Pierre Hervé-Bazin, directeur France des Ressources Humaines d'Areva, le constructeur français de réacteurs nucléaires.
UN ECART DE RESSOURCE A COMBLER ?
La pénurie de main d'oeuvre "pourrait être un facteur de ralentissement pour le programme nucléaire français", a dit Jean-Marie Chevalier, directeur du centre géopolitique de l'énergie de l'Université Paris Dauphine.
"Par exemple, au lieu de construire une centrale en 8 ans, cela pourrait prendre entre 10 et 12 ans".
Areva ressent déjà une tension dans son recrutement même si la situation n'est pas encore "dramatique" : "Entre la demande croissante pour le nucléaire et des équipes qui ont tendance à se réduire, on doit recruter deux fois plus pour compenser", observe Pierre Hervé-Bazin.
Areva projette de recruter 12.000 ingénieurs et techniciens dans le monde en 2008, dont 4.000 à 5.000 en France.
EDF, le plus grand opérateur nucléaire du monde, a aussi pris conscience du problème, particulièrement au moment où l'entreprise se développe à l'étranger.
"Le recrutement de compétences va être un élément majeur", qui conditionnera le futur, a déclaré Pierre Gadonneix, le PD-G d'EDF.
Les acteurs du secteur s'accordent à dire que la tension sera à son maximum dans quatre ou cinq ans. Cependant, dit Laurent Turpin, "On a toute une machine (d'écoles) qui continue à tourner, qui avait ralenti à une certaine époque parce qu'il n'y avait plus beaucoup de demande pour ces métiers, mais qui peut repartir très vite"."
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